17 Février 2013.

Le vent secoue mes mèches de feu, hurle autour de moi. Debout sur la pointe d'une falaise, je déploie mes ailes fragiles et me laisse tomber, tourbillonnant en descendant et redresse ma course au ras des vagues. Les soleils brillent haut dans les cieux, et les animaux des airs s'en donnent à cœur joie. Je reviens en haut de la falaise, et m'accroupis pour me dissimuler au regard de mes entraîneurs. Je marche ainsi, suis une rangée de buissons, et vole vers les bois. Je me gave de couleurs, de formes que je redécouvres. Des tulipes, des jacinthes et des campanules sauvages colorent les sous bois, et des bébés animaux peuplent les forêts pas milliers. Je retire mes bracelets répulsifs, et tournoie autour des branches des arbres qui se couvrent de fleurs et se mettent à bruisser des ailes des insectes multicolores. Aéras quitte lentement le manteau de l'hiver. Le peuple Sylvain est chargé par Gaïa de faire les saisons, aussi chaque année, nous passons trois fois une nuit entière sur chaque continent, hormis Nero, et nous ne occupons pas, bien entendu, de l'hiver. Et aujourd'hui, c'est un jour spécial. Nous avons reçu un message urgent de la Déesse Mère. Le Roi du continent et de tous les peuples aériens est de retour, et le printemps n'est pas encore là sur ce continent. Il vient normalement au 15 Mars, mais pour l'occasion nous devons changer la date. Nous avons donc filé sur Aéras, équipés et nous travaillons à enlever le froid manteau de l'hiver de ses forêts, plaines et vallées. Les glaces fondent peu à peu sur notre passage, les fleurs magnifiques déploient brusquement leurs corolles bigarrées et les animaux bondissent hors de leurs cachettes. Oisillons, faons, lapereaux, renardeaux, louveteaux, tout ce petit monde saute de tous côtés autour de nous. Avec la vue, ma maîtrise magique s'est affinée. Je sors du bois, fuyant les cris furieux de Yaïs et Tavel chargés de me surveillés, et les plaines s'étalent sous mes yeux. Je ne les avais jamais vues. Je cale. C'est magnifique. Des cavaliers voguent entre ciel et terre. J'ouvre des yeux comme des soucoupes, et mes ailes se mettent à frétiller au soleil. De l'herbe à perte de vue. Des chevaux sauvages. Je repars avec plus de calme, levant les yeux vers l'azur interminable, et la brise chaude vient soulever mes vêtements de soie avec douceur. Je fais éclore des tulipes, des jonquilles, des pinceaux indiens, des bleuets multicolores, des pavots, des anémones, des renoncules, des orchidées sauvages, des boutons d'or, des cosmos, des narcisses, des pensées et des violettes. Le parfum du printemps embaume petit à petit l'air, et je me laisse tomber sur le dos, avec pour seule compagnie la brise et un hérisson timide. Un peu plus loin, j'entends le chant flûté d'un crapaud. Rien ne sera plus comme avant.