Le temps s'écoule avec une paresse sans nom. J'ai l'impression de perde pied, de laisser lentement ma lumière s'éteindre, et de sentir la froideur des ténèbres s'insinuer dans la moindre de mes cellules. Mon coeur est devenu aussi froid que la mort, et dans mes veines, mon sang est liquoreux comme du miel, dangereux et attirant. C'est donc ça grandir ? Perdre sa lumière. J'ai peur. Perdue, toute seule dans la nuit, je me sens partir. J'aimerai tellement retrouver l'innocence du passé. Lorsque le monde tournait rond, qu'autour de moi, j'avais Mathieu et Tarek, et que de mon rire pur, j'illuminai nos chemins. Quand je croyais encore que la vie avait un sens et que les ténèbres ne m'attendaient pas à la fin. Mais maintenant où en suis-je réellement ? Certes, encore une fois, j'ai tout ce dont je peux rêver. Il m'aime, je porte son fils. Voilà la seule chose dont je suis capable de penser alors que je lui souris.

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Le croassement des grenouilles transforme le lac en un fourmillement de bruit. La nature se réveille enfin aux forces de la vie nouvelle, le printemps nous revient. Je laisse mon regard détailler une dernière fois la clairière qui nous a accueilli en son sein le temps d'une aprem midi puis reporte mon attention sur mon futur époux, laissant ma main caresser les formes naissantes de mon ventre. Le père de mon enfant est là, à mes côtés, sifflotant gaiement tout en sellant nos deux jumeaux, un immense sourire illuminant son visage. Un cheval l'accepte enfin, et il ne fut jamais aussi heureux. Pendu à l'une des sacoches de la selle, des iris jaunes colorent de leur pollen la croupe bai de l'équidé. Amarok se hisse à cheval et je fais de même, souriant à l'unique maître de mon coeur. Les juments prennent le petit trot, et je laisse un rire franchir mes lèvres. Je n'ai jamais été aussi heureuse quand ce moment, mes longs cheveux blonds caressant mon dos pendant que les chevaux accélèrent. Nous galopons longtemps, et j'aimerai que cette journée ne s'arrête jamais. Jusqu'à ce qu'il voit des enfants dans les jupes de leur mère. Leur rire nous parviennent, et il se retourne pour croisser mon regard. Ses paroles soulèvent des larmes dans mon regard, il fait des projets, me fait jurer que nous aurons beaucoup d'enfant. Si seulement il savait. Dans deux ans, Liriel sera l'être le plus puissant de la planète et dans trois, le dernier hybride.
Mais Amarok ne sera pas là pour le voir...