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 Retrospection

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AuteurMessage
Sylvain

Keiràn Ikrà
Keiràn Ikrà


PROFIL► AVATAR : Cameron Monaghan
► VOTRE AGE : 25
►PORTRAIT : Retrospection  Tumblr_inline_n8cshksNm11ssoiqt
► CIITATION : Never let them see you weak
► CREDIT : Me, tumblr
► ARRIVÉ LE : 04/04/2012
RPG
And about you ?
► AGE DU PERSO: 17 ans
►TITRE(s):
► LIENS:

Retrospection  Empty
MessageSujet: Retrospection    Retrospection  EmptyMar 24 Déc - 21:27

Lentement, j'ouvre les yeux sur l'obscurité. Je n'entends rien dans ma cellule de confinement, seulement mon coeur qui bat et mon souffle. Mais je sais que dehors, dans le parc, il pleut et que le vent secoue les arbres déjà malmenés par les trombes d'eau qui inondent les sentiers de promenade. Dans leurs bureaux, les médecins devaient sans doute siroter des cafés. Et nous, et moi, seul dans une cellule silencieuse avec nos pensées. Ça fait longtemps que je suis là. Je ne n'entends même plus le son de l"horloge que Mayson a fait mettre dans ma "chambre". J'ai froid. Dans ma tête, mes souvenirs luttent les uns contre les autres. Je me bat contre la sensation encore bien présente du sexe de mon psychiatre sur mes lèvres. Le goût atroce incrusté sur ma langue. La pression de sa paume derrière ma nuque. Le sel irritant accroché à mes cils. Je donnerais tout pour aller me noyer sous la pluie du parc.
/
Il pleut. Je regardes des enfants tout emmitouflés dans leurs manteaux tremper leurs gants en fabriquant des bonhommes de neige, devaler les tobogans et se courir après en riant, boules de neige en main. Le reflet de mes propres jeux reste incrusté dans mes yeux, et je voudrais hurler son nom. Mais je me tais, les lèvres entrouvertes, assis sur un banc couvert de neige et les bras enroulés autour de mes genoux ramenés à ma poitrine. Certains mômes s'arrêtent une semi seconde devant moi, vacillent sur leurs petits pieds et repartent, intimidés par les larmes qui coulent d'elles même sur mes joues aussi pâles que le sol sur lequel ils évoluent. Un père noël distribue des câlins. Les parents sourient, rigolent. Je me secoues enfin, frigorifié, et enfonce mes poings dans les poches de ma canadienne Goose bleue grise. Je marche dans les rues envahies, silencieux, l'esprit vide. Même le bijoutier où nos gourmettes ont été faites et achetées ne m'arrête pas. Je me sens complètement indifférent. C'est comme si je ne voyais pas les passants, comme si le reste du monde était devenu invisible. Je ne vois que les énormes flocons doux et légers comme le coton qui tourbillonnent. Mon coeur est froid, gelé aussi bien que les branches et les herbes sèches qui bordent les clôtures et les ruisseaux des terres familiales. Seuls mes fantômes me hantent encore. J'ai, au plus profond de ma chair, les marques de choses que je tente d'étouffer, que je tente de dominer. Ce corps étranger qui m'a ravagé trop tôt, ce que je me suis fait tout seul en revenant à Milwaukee.
Sans m'en rendre compte, je suis sorti de la ville. Je traine seul sur les chemins de terre de l'exploitation de la famille. Il n'y a rien d'autre que de la neige et des arbres nus dans mon champ de vision, et pourtant je ne me sens pas apaisé. Mes mains sont presque paralysées par la température mais je les sens à peine. Je finis par craquer, et revêt la peau d'un cheval aussi blanc que les flocons, aux naseaux roses et sabots immaculés, de longs crins dévalant mon encolure. Je déambule dans la neige, au pas, jusqu'au manoir Alaric de l'autre côté de la ville. Je fixe mes yeux d'or sur l'immense bâtisse, l'entrée du parc, les fenêtres illuminées. C'est Noël demain. Le temps d'un nouveau changement de peau, je vole vers la fenêtre de la pièce où je sais que se trouve mon ami d'enfance, à l'odeur. Entre mes serres, un paquet blanc et bleu. Je me pose en silence, les yeux posés sur ce garçon qui, même à quelques mètres de moi, me parait si loin. Comment aurait il pu redevenir mon ami après tant d'années ? Je déchire le papier des mes griffes, dévoilant un saphir taillé en forme de cheval ailé, les yeux de diamant, qui il y a des décennies trônait au dessus de la porte de son palais. C'était la fierté de son peuple, un joyau inestimable, que les mercenaires n'avaient pas manqué de dérober lorsqu'ils prirent son royaume. Perdu depuis bien longtemps, tout aussi longtemps que lui. Je ne dirais pas que retrouver sa trace était facile, mais je ne regrette pas de l'avoir fait. J'ai d'abord eu du mal à en croire mes yeux quand j'ai enfin mis la main sur cet objet aussi gros qu'un oeuf d'autruche, main il mérite ça. Et puis, je voulais qu'il l'ait. Juste pour le voir sourire. je frappe mon bec très fort contre la vitre, jusqu'à ce qu'il me voit, soulève un sourcil comme il l'a toujours fait. Je croise ses yeux bleus, et déploie à nouveaux mes ailes pour prendre mon envol d'un looping magistral. Je fonce vers le sol, revêt la peau d'une panthère arctique et file loin de chez lui, subjugué par le silence, paisible. Je ne galope pas pour fuir. Je galope pour sentir le vent dans ma fourrure, le sol sous mes pattes douces et légères. J'aurais aimé rester comme ça, un garçon doux tant qu'on ne me menaçait pas. Hélas, je suis devenu un garçon qui se sent menacé en permanence. Avec dans la bouche le goût terrible de la première fois qu'un homme a attrapé mes cheveux pour tirer mes lèvres vers son entrejambe, dans la chair la sensation de va et vient violent qui me donne envie de vomir, sur les hanches celle de paumes qui n'ont rien à y faire. Ce sentiment que mon corps n'est pas à moi. La tête pleine de sons sourds et secs, de soupirs répugnants. J'ai désespérément essayé de laver mon corps, ma peau, en vain. J'ai décidé d'enfouir cette crasse sous d'autres, pour ne plus la percevoir avec tant de force. Elle est restée. J'ai cherché à la rendre moins sale, en allant offrir mon corps à celui qui m'avait profané, pensant qu'avec mon consentement l'acte deviendrait moins insupportable, que ça me convaincrait que j'étais d'accord quand c'était arrivé, ou que je l'avais cherché. J'ai juste eut mal, et peur. Je me suis senti seul au monde quand il est mort, parce que je n'avais jamais osé lui renvoyer en pleine face la haine qu'il m'inspirait, que je ne lui avais jamais fait payer. Parce qu'il est parti sans m'avoir dit "Je m'excuse de t'avoir fait ça, je suis désolé, pardonne moi." Je n'aurais pas pardonné, mais j'aurais pu faire le pas en avant que jamais, plus jamais, je ne pourrais faire. Je navouerais jamais que c'est pour ça que j'ai mal vécu sa mort, mais je le sais. Il m'a tué, plus sûrement que d'un coup d'épée ou d'une balle dans la tête. Il a prit mon corps, mon esprit, mon sommeil, mon innocence et ma force pour que ne subsistent que la rage aveugle, la haine, la violence, la douleur et la peur. Il m'a enseigner comment tout détruire autour de moi, et sans que je m'en rende compte, j'ai mis ça en pratique. Je ne pourrais jamais revenir en arrière et je sens que l'enfant qui résiste en moi vacille de plus en plus, s'estompe, au profit d'un garçon violent et sans limites. je ne suis pas motivé à lutter contre lui.
Sur la fenêtre du manoir Alaric, à côté du cheval ailé de la nation de Mathieu, un ruban d'argent porte mon message ultime.
I'm sorry for all
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Retrospection

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